Six Miniatures en Trompe-l’œil, pour 2 flûtes, 2 clarinettes, 2 cors, 2 percussions, piano, harpe, 2 violons, alto, violoncelle (1991)
Commande de l’Eic et de la Fondation Crédit Lyonnais

Ces miniatures sont organisées comme six pièces autonomes séparées par un court silence et s'enchaînent selon des oppositions très marquées (tension/détente ou vif/lent). En revanche, si on les joue sans interruption dans l'ordre 1-4-2-5-3-6, l'auditeur percevra une forme organisée selon un principe constant de transition. Les 3 premières miniatures utilisent chacune deux "situations" musicales très caractéristiques (une de départ/une d'arrivée) qui réapparaissent dans les trois suivantes dans un ordre différent. Ces "situations musicales" sont organisées selon un ensemble de "lois" qui peuvent s'appliquer à la structure des accords et à leur répétition dans l'oeuvre, à l’écriture des "voix" d'une polyphonie, au rythme, à l'instrumentation... à la forme même. Chacune des miniatures, trajet entre deux situations distinctes, est à la fois construite à l’aide de processus algorithmiques (Programmes CARLA de Francis Courtot et Esquisse de l'IRCAM) et de techniques d'écriture plus traditionnelles. Prenons à titre d'exemple, la première miniature; elle se présente comme une série de sept variations qui sont perçues dans leur ensemble comme un "trajet", un processus directionnel, bien que non linéaire. Chaque variation commence par une section composée à la main où les instruments jouent les mêmes formules rythmiques au caractère volontairement “swingué”. Chaque début de section, confié à l'ordinateur, est déformé par des techniques de compression et dilatation rythmiques et par diverses contraintes appliquées à l'organisation mélodique. A la septième variation, il ne reste rien de le section “swing” de départ, mais seulement son image déformée et filtrée de manière à ne laisser entendre que certains points importants de la polyphonie engendrée par l’ordinateur (résonances des percussions, de la harpe et du piano). Plus généralement, la perception de ces miniatures oscille entre perception globale et perception différenciée (entre timbre global et polyphonie, entre spectres et accords, entre hauteurs et notes). Le sous titre "en trompe-l'oeil" est là pour rappeler dans quel état d'esprit ont été conçues ces pièces, à un moment de ma vie où j’étais lassé des étiquettes réductrices collées sur les œuvres et les compositeurs (spectral, sériel, minimal…) : ainsi, les miniatures les plus “harmoniques” sont organisées selon des règles de contrepoint quand les plus rythmiques sont construites à partir d’un travail spectral sur le timbre. Le terme d'anamorphose pourrait aussi s'appliquer à ces miniatures qui changent totalement d’aspect au fur et à mesure que l’auditeur avance dans le temps à l’instar du promeneur qui passe devant une fresque anamorphotique.

Ces Six miniatures sont dédiées à Francine et François Derveaux.

P.Hurel

» Télécharger la notice : Six miniatures.rtf «

 

© 2007-2010 - Philippe Hurel et Gilles Pouëssel