CD Flash-back - Dossier de presse

           

puce « Ennemi des poses et des contorsions, Philippe Hurel [ose le] franc-parler musical, écrit avec une grande justesse son commentateur Eric Denut. Ses œuvres les plus récentes jettent un nouvel éclairage sur la tradition musicale du XXème siècle. L’actualisation des formes par processus et l’exploration de certains modèles rythmiques sont plus que jamais à l’ordre du jour d’une écriture qui exploite à son paroxysme le pouvoir décuplé de la nécessité et de l’arbitraire.
» Miniatures, sa pièce phare qui se joue à travers le monde, nous le laissait entendre, comme un grand boum. Philippe Hurel contenait dans un espace restreint une extraordinaire quantité d’énergie. Puissance dans confinement, et c’est la bombe. Le public s’y retrouve, quand l’auteur a pu souffrir un temps au fond de lui d’une telle déflagration. On ne sort pas indemne à manier la force en Pluton lorsqu’on a la sensibilité opiniâtre d’un Prométhée.
Aujourd’hui, Philippe Hurel a intégré cette capacité au séisme, réduite à la notion récurrente et si humaine de « crise ». Finie la fuite en avant de la musique spectrale (l’école française des années 80 et 90 de composition fondée sur l’analyse du spectre sonore), cette « infinie transition » du son qui peut se transformer mécaniquement, voire académiquement si l’on n’y veille. Pour donner à l’auditeur « la clé de lecture d’une pièce », Hurel y a introduit des éléments (bannis jusque là) du discours, et pourquoi pas même le contrepoint. A ce point, son énergie vaillante et fragile prend les allures tendres du Berg de Wozzeck se colletant les formes passacaille ou bourrée pour perdre l’auditeur dans les délices du neuf.
Pour Luigi (1994) est une œuvre bilan, dans l’œuvre de l’auteur comme dans le siècle. Ici, pas de passacaille mais l’archaïsme de la détermination sérielle (en apparence, assez boulézienne d’ailleurs, de la même façon qu’une pièce peut sonner tonale sans l’être) et la liberté du groove du jazz qui permet d’introduire des motifs rythmiques dans le dogme de la fade fluidité spectrale. La pièce « …à mesure »(1997) renforce cette veine jusqu’à un « jeu d’anticipations et de retours en arrière proches du flash-back cinématographique ».
Pas étonnant alors que la grande pièce pour orchestre de 1998 s’appelle Flash-Back, et que le jeu des réminiscences y signifie à la fois la technique de construction déjà décrite et les citations que l’auteur fait de ses précédentes œuvres. Il y a dans ce jeu sur le temps et la mémoire quelque chose du pandémonium bien organisé des fanfares d’Ives qui se brouillent comme des souvenirs dans les Scènes de la nouvelle Angleterre.
Le Tombeau de Gérard Grisey (1999), comme il se dit dans la tradition française (Le Tombeau de Couperin), est la preuve même de cette étroite intrication chez Hurel du charnel et du réfléchi. Taquiné par la toile d’araignée des systèmes sériels et spectraux, fruits beaux et vénéneux d’un certain autoritarisme jacobin appliqué à la musique, Hurel le « couillu » s’y était soumis sans trop le reconnaître, passivité d’enfant doué peut-être, et fasciné par leurs ors. La mort brutale de Gérard Grisey, figure tutélaire et pourtant détachée de la musique spectrale, a eu sur lui, comme sur d’autres, l’effet d’un révélateur : « Pour la première fois, ma musique ne sera pas objective, dit Hurel de ce Tombeau qui est aussi celui de la vieille part de lui. J’ai eu beaucoup de mal à en calculer le matériau et mon abandon par instants à l’intuition la plus complète n’aurait peut-être pas plu à mon dédicataire [, même si] je n’aurais pas pu l’écrire sans lui.
» Et si Gérard Grisey était mort de ça, pour ça ? Faute de voir disparaître la génération des grands-pères pionniers de l’après-guerre (on vit si tard désormais), il s’est peut être sacrifié, lui le « père », pour donner congé à des disciples qu’il ne voulait pas dominer, surtout pour leur imposer une liberté qui ne s’impose pas. Ce Tombeau est un superbe tourbillon de sons ravéliens et de pulsations quasi-érotiques qui voudrait et ne voudrait pas s’ancrer à des grappes sonores (clusters) bien fichées en terre, elles. Tout n’y est que bonheur, même celui du deuil, comme un joyeux banquet après l’enterrement…
C’est à partir d’ici que Philippe Hurel ne réservera plus sa jubilation profonde à la seule dégustation du foie gras. La voix, l’opéra peut-être ? Pierre-André Valade, à la tête du précis ensemble Court-Circuit, vit aussi sa métamorphose. Le subtil flûtiste devenu chef de nombreux ensembles et orchestres s’affirme très solide. Il a fait que l’adjectif délicat ne signifie plus pour lui que délicatesse. »
Jean VERMEIL - Classica

puce « (...) C'est avec un plaisir non dissimulé que ce nouvel enregistrement monographique fait son apparition, et ce grâce au récent label Æon (...) Tombeau in memoriam Gérard Grisey ainsi que le dyptique ...à mesure et Pour Luigi viennent compléter cet enregistrement, interprétés par l’ensemble Court-Circuit et la baguette infaillible de Pierre-André Valade, grand connaisseur de la musique de Hurel puisqu’ils fondèrent tous les deux ce même ensemble. À l’écoute de ces musiques, on reconnaît immédiatement le son Hurel, peut-être ce qu’on pourrait appeler son style. Une musique éminemment rythmique, virtuose et périlleuse incluant une large palette sonore mêlant micro-intervalles et impressions, si l’on peut dire, jazzistiques.
À cet égard, rendons grâce aux musiciens ici présents pour avoir su transmettre aussi magistralement une musique se situant souvent sur le fil du rasoir.
Enfin, une mention particulière pour Tombeau, d’où émane un sentiment de liberté, une souplesse, qui peut-être fait défaut, par moment, aux trois autres œuvres. Il n’empêche que ces enregistrements constituent un disque absolument splendide que l’on ne peut que recommander. »
Eric Seigneur - MusO - Février 2002

puce « Dans les notes de présentation, Eric Denut parle d'«hétérogénéité jubilatoire» à propos de la musique de Philippe Hurel. (...) La jubilation, on l'observe dès l'étonnante effervescence de la pièce intitulée ...A mesure, dont la tension est ici parfaitement soutenue par un groupe de six musiciens. Ce style impétueux, cette éloquence d'un discours où la répétition fréquente de formules rythmiques donne, en fin de compte, le sentiment d'une musique passablement obsessionnelle, on les retrouve aussi bien dans flash-Back que dans le Tombeau in memoriam Gérard Grisey et Pour Luigi, - composées entre 1994 et 1999, ces quatre œuvres connaissent ici leur premier enregistrement(...).
A côté de l'Orchestre de Paris (sous la direction attentive de Bernhard Kontarsky) officie l'Ensemble Court-Circuit, dont Hurel est l'un des fondateurs. L'auteur ne peut être que satisfait de ses interprètes et de Pierre-André Valade, directeur de la formation. »
Claude Samuel - Diapason - Mai 2002

puce « Si les processus à l'œuvre dans Flash-Back (1998) sont complexes et le tissu sonore foisonnant, l'impression immédiate est d'une grande brillance. De sa fréquentation avec le spectralisme, le compositeur a conservé une préoccupation pour une perception globale du son. Comme dans plusieurs autres œuvres récentes,une audition plus attentive laisse aussi percevoir une réflexion rigoureuse sur l'interdépendance des éléments du discours. »
La lettre du Musicien - Décembre 2001

 

© 2007-2010 - Philippe Hurel et Gilles Pouëssel